Jamie Foxx, je t’avais mal jugé. Jusqu’à maintenant, le seul film que j’avais vu avec un de tes rôles, c’était Furtif, un navet tellement nase que j’en avais ris pendant deux heures et demie, surtout que tes interventions avaient tout du cliché « black coolisant qui se la pète ». Autant dire que je m’étais gourré sur ton compte (tu avais joué là dedans juste pour le chèque), car avec Collatéral, tu t’appliques comme un Denzel Washington, et tu parviens presque à devenir impressionnant le temps de quelques scènes. Respect, surtout que dans ce thriller, tu parviens à être de taille face à Tom Cruise (qui fait lui aussi des efforts de jeu).
L’histoire : un taxi est payé par un tueur pour le transporter pendant toute une nuit jusqu’au lieu d’exécution de ses contrats.
En effet, dur de prévoir qu’on allait avoir affaire à un thriller de belle qualité. Si la filmographie de Michael Mann m’est étrangère, Tom Cruise semblait prêt à bouffer toute l’intrigue avec son personnage. Pourtant, Michael Mann fait preuve d’un certain savoir-faire, en prenant son temps pour d’abord planter son personnage de chauffeur de taxi nocturne, plutôt sympathique et avenant, et en tout cas bien loin des clichés du black tchatcheur de Furtif. Une personnalité fluide, un poil passe-partout, mais qui nous est attachante dans cette ville très hype quand la lune se lève. La photographie et les ambiances nocturnes sont à ce titre bien travaillées, rendant immédiatement le film agréable à voir (c’était Drive avant l’heure). Et ici, le personnage de Cruise fait instantanément plaisir, puisqu’on sait d’or et déjà qu’il va être le méchant de l’histoire. Enfin, méchant… Il joue d’abord sur l’ambiguité de son statut de tueur, le dernier acte délivrant enfin seulement le but de sa mission de nettoyage. C’est d’ailleurs cette ambiguité du personnage du tueur qui font à la fois sa force et sa faiblesse, les fréquentes saillies émotionnelles du personnage semblant en total décalage avec les pics de violence du film qui ne manquent pas d’impact à chaque meurtre. Par son concept (5 meurtres à effectuer d’un bout à l’autre de la ville), le scénario assure un certain rythme, en ponctuant le film du récit par de fréquentes péripéties qui viennent retendre l’action quand elle commençait à s’étioler. Mais si niveau évènements, ça balance bien, les dialogues bénéficient eux aussi d’un grand soin, plantant très bien le raisonnement des deux personnages au cours des trajets en voiture. Soin primordial, puisque c’est principalement au cours de ces petits « temps morts » que nos personnages se confrontent, la vision du tueur considérant les individus comme insignifiants s’attaquant à la carrière du taximan, qui stagne à son poste malgré des projets d’avenir plus prometteurs. Toutefois, Collatéral n’est pas sans défaut. Sa formule toute faite (un tueur et un monsieur tout-le-monde obligé de l’épauler, des péripéties bateaux, comme les deux flics qui arrêtent la bagnole pour l’inspecter et qui se barrent au dernier moment…) l’empêche quelque peu d’accéder à un statut de chef d’œuvre (si le spectacle est bon, je ne me rappelle pas avoir été vraiment emballé par une séquence), le spectacle est largement divertissant, reposant sur un bon duo d’acteurs qui fonctionne beaucoup mieux que ce à quoi on aurait pu s’attendre. Un peu bateau (comme cette chronique), mais un thriller qui remplit largement son office.
4,5/6
2004
de Michael Mann
avec Tom Cruise, Jamie Foxx