Un petit film bis assez amusant que ce Docteur Jekyll & Mr Hyde. S’appuyant sur le récit fantastique de la littérature anglaise et sur les frêles épaules de John Hannah, ce TV film se révèle, contre toute attente, assez intéressant. Si le manque de budget est là et que le film peine à élargir son débat sur la nature humaine (on restera toujours enfermé dans ce schéma Bien/Mal présent en chacun), cet essai plutôt convaincant peut sans honte se ranger à côté du Sweeney Todd de Todd Moore.
L’histoire : Le docteur Jekyll, médecin renommé, tente avec ses recherches de définir la nature de l’être humain et propose un schéma novateur pour l’époque : le bien et le mal seraient présents en chacun. Sur ce postulat, il tente de synthétiser une drogue pour isoler les deux caractères…
Si le film ne sort pas de ses sentiers battus (il n’abordera que la seule thématique rapportée ci-dessus, mais en profondeur), il se révèle assez adroit dans les argumentaires de l’époque et dans le parcours de son scientifique (qui affronte les foudres de ses semblables avec ses nouvelles théories). Mais comme il est visionnaire, il s’attire la bienveillance d’un politicien, qui l’engage à continuer en douce ses recherches : la synthétisation d’une drogue permettant d’isoler le mal pour ne laisser que le bien à l’individu. Le sérum d’Orange mécanique en quelque sorte. Sauf que bien évidemment, si les deux caractères sont isolés, c'est le mal qui prend l'ascendant et qui commence à emmener le docteur Jekyll dans des lieux mal famés, et qui le poussent peu à peu à commettre des actes violents, puis des meurtres. Si le tv film ne paye jamais de mine (les décors sont minimalistes, l'intrigue reste dans le cadre de l'intimité du docteur et s'intéresse à peu de destins parallèles. En dehors des domestiques de plus en plus suspicieux, on ne verra qu'un politicien et le policier chargé de l'enquête. Toutefois, la violence du film est plutôt bienvenue, ce dernier laissant le sang éclabousser les murs, se laissant aller à quelques intrusions dans le gore plutôt surprenantes, témoins de la volonté du réalisateur de livrer une oeuvre sombre. La psychologie torturée de notre personnage est quant à elle plutôt bien dépeinte, même si John Hannah se révèle plus convaincant en Hyde que Jekyll. Le film les confronte souvent (la classique illustration de la schizophrénie au cinéma), au alenturs de reflets ou de rêverie, mais peu à peu, Hyde se fait plus intrusif, jusqu'à un final plutôt efficace pour la modestie du projet, qui confronte l'acteur dans ses deux rôles, allant jusqu'au contact physique. Des ambitions techniques modestes, mais réussies et qui payent, cette version du docteur Jekyll se révélant la plus intéressante que j'ai vu pour le moment. Le film souffre un peu de sa facture technique pauvrette, mais le résultat n'est pas décevant, même si l'exil en France est oublié au profit d'un dénouement classique mais moral.
4/6
2003
de Maurice Phillips
avec John Hannah, David Warner