Avec Maniac, Lustig se fait connaître du grand public en mettant en scène un des films de psychopathe les plus malsains avec Schramm (massacre à la tronçonneuse ne joue pas vraiment sur le même terrain, inutile de les comparer), la caméra nous faisant partager le quotidien du psychopathe, ainsi que chacun de ses meurtres. Un éclairage cru, du gore poisseux qui apparaît régulièrement (Tom Savini nous dévoilera un savoir-faire impressionnant) et quelques pistes psychologiques nous permettant d’en apprendre plus sur le tueur campé par l’impressionnant Joe Spinell qui porte littéralement le film sur ses épaules larges et son physique rondouillard mais imposant (comme on dit, il n’est pas gros, il est baraqué…). Une plongée impressionnante dans la folie meurtrière, que le maigre budget ne semble guère handicaper, et le lancement de la carrière de Lustig qui nous offrira par la suite quelques perles comme Maniac cop 1 et 2.
L’histoire : le quotidien d’un concierge d’immeuble serial killer, qui tue ses victimes pour placer leur scalp sur des mannequins.
L’introduction annonce immédiatement la couleur, nous faisant vivre un meurtre barbare dès les 5 premières minutes, au couteau avant de passer à la corde de piano. On commence alors à découvrir l’appartement de notre maniaque, dans un bazar pas possible avec de nombreux mannequins menottés au mur, certains portant des scalps humains. Notre maniaque leur parle, les traite comme des compagnes, mais ne tente jamais de coucher avec eux. Adoptant un mode d’immersion glauque, mais pas dénué de recul (les meurtres sont toujours vécus du point de vue des victimes), Maniac est le suivi d’un comportement psychologique dévient, une plongée dans la folie d’un homme. Si le film ne se montrera jamais direct quant au passé de son personnage, ils nous laissera quelques gros indices (les cicatrices sur son corps, l’influence non négligeable d’une mère sur-protectrice à qui il continue de parler) en nous laissant toutefois le soin de nous faire notre avis. Venons en maintenant à l’amoralité du film, qui a été qualifié de misogyne lors de sa sortie. Bien sûr, un tueur en série qui ne s’en prend qu’aux femmes (ou presque, un ou deux compagnons, dont Tom Savini, périront aussi entre les mains du tueur) ça a l’air complètement machiste. Mais la prise de distance qu’opère le film est son dénouement féministe (certes un peu gros) suffisent à le dédouaner de tout sobriquets péjoratifs sur ce terrain. Maniac est là pour nous faire partager les frustrations de son tueur, qui n’est au final jamais vraiment satisfait des crimes qu’il commet. Son mode de vie l’aliène à son besoin viscéral de tuer (en variant les plaisirs : il change souvent d’arme) et ne lui apporte jamais le bonheur qu’il recherche. Paradoxalement, le film essaye de l’aiguiller sur cette voie par une relation classique avec une photographe (les photos de mannequins font partie des petits passe-temps du tueur), mais cela ne suffira pas à l’éloigner de son passé de meurtre. Amoral, imprévisible et finalement impressionnant, le film l’est aussi grâce à ses fréquentes saillies d’ultra-violence, pour lesquelles le film s’est offert les talents de Tom Savini. Et l’homme s’en donne à cœur joie ! De multiples défis techniques lui permettent de montrer l’étendue de son savoir-faire, en nous offrant notamment le tir facial le plus impressionnant qu’il m’ait été donné de voir à ce jour (l’effet est parfaitement dé-gueu-lasse). Réaliste et ne cherchant jamais à embellir la violence, Maniac est finalement un film qui fait le portrait d’un serial killer dans tous ses paradoxes et qui transcende son maigre budget par de solides maquillages et une interprétation excellente de ses (petits) acteurs. Un solide début pour William Lustig qui se laissera aller à une horreur moins sérieuse avec Maniac cop, mais non-moins attachante. Une référence du genre.
5/6
1980
de William Lustig
avec Joe Spinell, Caroline Munro