Soderbergh a toujours été un réalisateur perfectionniste, qui aime bien lécher ses films afin de ne laisser aucune aspérité gâcher ses confections. Si ça fonctionnait parfaitement avec l’excellent Kafka (un film certes auteurisant, mais magnifiquement réussi car reproduisant fidèlement les messages et les ambiances de l’auteur), qu’en est il de ses films qui sont prévu pour un plus grand public ? J’en par là bien sûr la saga des Ocean’s, qu’on m’a toujours présenté comme un must de la série des films de gangsters. Après vérification, on peut dire… que non.
Ocean’s Eleven : Intéressant de commencer sur de bonnes bases. Le film se présente en effet comme une honnête entreprise au départ, en présentant George Clonney comme un braqueur né, embobineur à souhait, qui dès sa sortie de prison recommence à magouiller pour retrouver son ancienne vie de luxe. A ce propos, on remarquera combien les enjeux moraux sont vite évincés de la course, car il risquerait de ternir l’image de nos héros (si c’est pas dommage, ça !). Bref, passons sur l’amoralité et concentrons nous sur le casting. C’est carrément du pur premium, affichant des glorieux noms comme Pitt, Damon et Clonney ! Là, Soderbergh ne fait pas les choses à moitié et montre de bonnes ambitions pour nous offrir un spectacle à la hauteur. Mais voilà : le spectacle, on l’attend un peu quand même. On assiste à la planification d’un gros coup. Il faut donc récolter un maximum d’informations, et ça prend du temps. Pendant ce temps, Pitt et Clonney se constituent leur équipe comme dans les missions impossibles, Cruise en moins. Une fois le braquage engagé, ça devient intéressant, une sorte de petit suspense commençant vraiment à prendre. Moi, je me foutais un peu des braqueurs (ce que Soderbergh ne voulait absolument pas, tant il prend de temps et de peine à les caractériser) et de leurs dialogues sympathiques, je voulais du suspense en plus d’un petit goût pour l’aventure. Ca arrive enfin lors de la deuxième moitié, avec quelques séquences de suspense amusantes et un twist attendu mais efficace. Alors oui, les personnages ont la classe. Ils en mettent d’ailleurs pleins la vue, ayant rarement l’occasion d’interpréter des personnages aussi cools. La mise en scène efficace, la photographie de qualité sont autant d’arguments techniques convaincants pour la défense du film. Mais quand même, y avait-il besoin de faire un tel ramdam autour de ce projet ? C’est bêtement un film de braquage, pas plus intelligent, plus soigné ou plus jouissif que les autres ! C’est un travail honnête avec un casting compétent, mais ça ne va pas vraiment plus loin. Pour ma part, je trouve le film moyen, bien qu’il reste de loin le plus sobre de la saga.
3.5/6
de Steven Soderbergh
avec George Clooney, Brad Pitt
Ocean’s twelve : Alors toi, je ne vais pas te rater. Incontestablement, on tient ici le pire film de la saga, pour ne pas dire de la filmo de Soderbergh (avec le chiantissime Girlfriend experience). Il reprend les ingrédients du premier épisode, mais il en multiplie certains aspects à puissance 1000, ce qui crée des scènes monstrueuses, tant en bien qu’en mal. De mon point de vue, c’est plutôt en mal. Reprenons le casting. Déjà, on retrouve notre oiseau plumé du premier film, qui compte bien ici récupérer son pognon à tout prix. Mais si ce point de départ pouvait se révéler amusant, il sera bien vite esquivé pour préférer une nouvelle direction infiniment plus prétentieuse que le premier volet : le vol et le trafic d’art. Et qui voit-on arriver sur son beau bateau les cheveux flottant au vent ? Cassel en personne, un braqueur français qu’on va se faire un plaisir de ridiculiser, car les meilleurs braqueurs sont les américains. Dès son apparition (où il cabotine comme un forcené), on sent que le film va partir en cacahouète dans une surenchère stupide de braquage. C’est peu de l’écrire, les enjeux se révélant d’une bêtise inversement proportionnelle au degré de sophistication abrutissant des astuces déployées pour assurer le spectacle. Hologrammes improbables, copies, coffres forts hyper sophistiqués, tout y passe, sans que l’immense surenchère parvienne à impressionner votre critique décrivant fébrilement son ressenti. A vrais dire, le comble, c’est quand Cassel fait son braquage en dansant du hip-hop en rythme au milieu des lasers de la pièce, inscrutés dans pas mal d’objets d’arts du musée. La scène, d’un ridicule égalant la prétention, achève définitivement le peu de sérieux qu’on pouvait prêter au film, en en faisant définitivement u n block buster de casting purement ludique où le mieux payé sera celui qui cabotinera le plus. Comme on l’attendait, le français se fait avoir comme une merde (on sentait venir le coup trente minutes à l’avance) et nos héros gagnent encore une somme mirobolante en prime, vu qu’ils ont fait ça surtout pour prouver on ne sait quoi aux français. Bref, ce film, il faut le regarder comme un divertissement régressif injustement complexifié, avec des gags cools rapidement insupportables et des stars qui n’en font qu’à leur tête. Soderbergh, tu as gâché ta saga en beauté.
1/6
de Steven Soderbergh
avec George Clooney, Brad Pitt
Ocean’s Thirteen : Lors de l’opus précédent, je m’étais farouchement opposé au cabotinage omniprésent des acteurs. J’aurais dû préciser : « cabotinage omniprésents des acteurs qui ne sont pas intéressants en l’état ». En effet, ce nouvel opus, encore moins sobre que son précédent, est parvenu à remporter mon adhésion à l’aide d’un seul acteur : Al Pacino. Ce dernier se livre à un vrai numéro de cabotinage en magnat de l’immobilier de luxe et directeur de casino obnubilé par le détail, et dont on aura droit à toutes les frasques pendant une bonne demi-heure sur les deux longues heures du film. Son charisme fait feu de tout bois et il déchaîne vraiment notre hilarité avec ses perpétuelles frasques sur le monde du luxe (le portable en or est une idée assez intéressante, certains modèles de portables atteignant eux aussi des coûts aussi scandaleux). Au niveau du casting, on se lâche à fond, en reprenant bien sûr nos précédents héros et leur refilant une nouvelle équipe de cabotins sur les bras. Heureusement qu’Al Pacino les éclipse un peu parce que sinon, c’est vraiment pas la joie. Particulièrement pour Don Cheadle, qui ne peut pas s’empêcher de faire son mariole de service en face d’un Pacino bien plus crédible que lui. On ne parlera même pas du plan, totalement foireux et tournant totalement au ridicule (maintenant, on utilise une foreuse d’une centaine de tonnes pour déclencher les alarmes du building… Sans commentaires). Y a pas à dire, le projet se vautre complètement dans le portnawak en essayant de se rendre sympathique auprès des joueurs, enchaînant les dialogues humoristiques faisant interagir les stars avec des saynettes de gentil banditisme sensées préparer le plan final. L’apparition guest star de Cassel ne dépareille pas avec l’ensemble du film. Il passe simplement pour avoir à nouveau l’air con, en se faisant entuber de la même manière que le film précédent. Nos héros s’assoient d’ailleurs à nouveau sur la moralité en s’engageant auprès de leur ancienne victime, et en ruinant totalement un magnat du grand luxe… en se remplissant les poches pour à nouveau mener une vie luxueuse. Qu’il est plaisant d’avoir des fins de la sorte. Au bord de la contradiction, j’aime décidément ce film qui contient dès lors tous les excès et les dérives qu’un tel projet pouvait susciter. Les designs luxueux de l’hôtel sont d’ailleurs assez appréciables, les décors étant alors d’un raffinement enfin digne de la direction de Soderbergh. En résumé, c’est le plus outrancier des films de la saga, mais aussi un des plus attachants. En faisant la somme, on tombe pile sur la moyenne !
3/6
de Steven Soderbergh
avec George Clooney, Brad Pitt
"Me boss, you not !"