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19 août 2013 1 19 /08 /août /2013 11:21

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On m’a toujours vendu Lost Highway comme le film le plus lynchien de sa filmographie. Il y avait donc une certaine réticence à le découvrir, ainsi qu’une prémonition d’embarras devant l’énigme qui s’annonçait. Et effectivement, une fois l’objet révélé, on est assez embêté pour tenter de rationaliser l’affaire (c’est sans doute un des objets les plus biscornus que j’ai pu découvrir cette année (loin devant Beyond the black Rainbow). En fait, rarement l’expression film miroir aura été aussi bien portée.

L’histoire : Fred Madison, saxophoniste, reçoit d’étranges cassettes vidéos montrant une l’intérieur de son domicile. Sans recours, il est alors confronté à la personne s’étant introduite dans son domicile et se retrouve accusé du meurtre sauvage de sa femme.

 

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Il est assez perturbants de se retrouver dans un film qui conserve toujours des lieux communs, mais qui organise régulièrement des ruptures si énormes qu’elles brouillent totalement les repères du spectateur, ou le perdent dans des boucles (Renee, sœur jumelle ou pas ?). Encore une fois, le film se révèle être un tel casse tête que beaucoup de chroniques se bornent à décrire les différents axes, au vu de l’incapacité à cerner globalement le film. Il compile beaucoup de thématiques subtilement diluées dans le fil du récit, comme l’impuissance dans la première partie, la jouissance totale dans la seconde, et l’introduction du porno dans le récit (le personnage de Dick Laurent en est l’incarnation même, jusque dans son nom –Dick, pas besoin de faire un dessin (on pourrait d’ailleurs rebondir sur l’impuissance et la première phrase du film : « Dick Laurent is dead. »)). Pas nouveau de découvrir un contexte sexuel chez Lynch, ce dernier est toujours très présent, mais il bénéficie d’un développement conséquent (faisant même un clin d’œil au voyeurisme par l’intermédiaire des deux policiers chargés de la surveillance qui épient les moindres faits et gestes de notre protagoniste principal, y compris pendant ses escapades), car lié avec la folie, disons le, schizophrène, qui habite le film. Commençant comme un authentique thriller (excellente trouvaille que ces vidéos insidieuses qui s’infiltrent dans le logis pendant le sommeil des occupants). On penserait à Caché de Haneke, sauf qu’ici, dès la seconde, on est déjà dans l’angoisse totale. La menace n’est pas identifiée que le spectateur est déjà aux aguets. Le responsable de la menace, semblant tout droit sortir des années 30, est là aussi une vraie claque cinématographique, amorçant une micro boucle téléphonique, premier véritable élément fantastique du récit (et annonciateur de folie) ? La première partie du film se déroule dans une ambiance étrange, limite tordue, comme un thriller de home invasion où le quotidien de nos personnages semble vampirisé par le machiavélique intrus. Puis a lieu le traumatisme central (le meurtre, dont on ne verra que de vagues images très agitées), qui amorce le revirement complet de la narration, introduit le thème de la folie avant de rompre brutalement avec le changement pur et simple du personnage central. Par un miracle scénaristique, Fred Madison devient Pete Dayton, personnage qui n’avait jusqu’à maintenant jamais été abordé par le récit. Relâché après vérification de son identité, on suit alors Pete dans sa petite vie de garagiste. Question rupture, on a rarement été aussi coupé dans une narration. Et par intermittence, de petites connexions reviennent… Un air de saxophone à la radio, des crises d’amnésies… Jusqu’à la rencontre avec Alice, et pas tout à fait celle de ses rêves. Liée au maffieux Eddy par son obscure profession, ses appels au secours ne laissent pas Pete indifférent, et la planification d’un nouveau meurtre commence. Le ton du récit devient plus agressif, à l’image de la bande originale, qui donne alors dans le Rammstein et Marilyn Manson… Agressivité qui culmine au cours d’une nuit plutôt chargée question meurtre, et qui se livre à un curieux jeu concernant Renee / Alice (qui se ressemblent comme des jumelles), qui apparaissent sur la même photo, semant le doute dans l’esprit du spectateur avant une séquence cauchemardesque dans un couloir. Quant au retour de Fred (qui remplace donc Peter), il est lui aussi abrupt (il n’est occasionné par aucun élément déclencheur, on pourrait même croire à un faux raccord), rompant totalement avec toute tentative d’explication logique. On sort clairement du contexte de délire schizophrénique, on est au-delà. L’incarnation de la folie réside en tout cas dans l’étrange visiteur des années 30, qui armé de son caméscope, se révèle être le fidèle compagnon de Fred, l’épaulant dans sa « vengeance ». C’est d’ailleurs ce personnage qui introduit en premier dans le récit la « dualité » par son jeu de boucle téléphonique, et le premier donc à voir deux personnes à la fois (le même jeu qui se reproduira avec le premier rôle féminin du film). Tel qu’il est structuré, Lost Highway échappe à toute analyse. Il brasse en revanche une foule de thématiques (le spectateur sera d’ailleurs attiré par ce qui lui tient à cœur, dans le cas de ce blog, ce sera donc l’impuissance de la première partie et l’aura troublante de Renee/Alice), mélange les genres (policier, thriller, horreur pour les principaux) et joue surtout avec les codes cinématographiques, rompant volontiers avec la cohérence pour perdre intentionnellement son public dans une énigme sans issue (la fin sous forme de fuite en pleine transformation physique n’en est qu’un détail). Aussi déstabilisant que les promesses le laissaient entendre.

 

5/6


1997
de David Lynch
avec Bill Pullman, Patricia Arquette

 

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13 juillet 2013 6 13 /07 /juillet /2013 16:07

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INTERDIT AUX MOINS DE 18 ANS

 

Sweet movie de Dussan Makavejev appartient définitivement au rang des OFNI cinématographiques. Réalisé en 1974, il reste relativement méconnu, et pour cause, ce film possède toutes les caractéristiques du mouvement Panique, sans pour autant y être rattaché. Le film est trouvable sur youtube, et m'a été recommandé par Zogarok (dont la chronique ferait passer mon aperçu pour un flyer touristique). L’overdose de symboles est là, tout comme le surréalisme de la mise en scène, toutefois, le fond est radicalement différent des travaux d’un Arrabal ou d’un Jodorowsky…

L’histoire : Gagnante du concours miss monde 1984, une femme est mariée à un riche industriel, qui après l’avoir déflorée, la jette dans le caniveau. Vivant un parcours initiatique à la Justine, elle échoue à Paris dans une étrange communauté. Pendant ce temps, à Amsterdam, une péniche menée par une folle parcours les canaux de la ville en prenant quelques fois des personnes à son bord.

 

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Sweet movie est en quelque sorte un test intelligent à soumettre à tous les cinéphiles, puisqu’il est malgré sa façade, un film piège. Il possède tous les oripeaux du chef d’œuvre des années 70, toute l’exubérance, tout le politiquement incorrect d’une époque (avec le contexte de libération sexuelle, le quota de nudité explose ici, au-delà de toute pensée rationnelle), et c’est ce qu’il y a derrière ce masque fantastique qu’il faut pouvoir identifier. Or, et c’est bien le problème de Sweet movie, il tourne complètement à vide, et tente de faire passer ses délires pour des dissertations psychologiques ou des dénonciations bon enfant qui ne coûtent rien (les vilains industriels, les vieilles biques, les riches, la télévision…). Au premier visionnage, le choc est tel qu’on est fortement tenté de crier au chef d’œuvre, on est tiré dans des tas de directions à la fois, mais impossible de faire un tout cohérent, de résumer en une phrase. Car Sweet movie est un fourre-tout, un pot pourri des pensées de son auteur, dans lequel on peut voir quelques fils conducteurs. Ils tiennent essentiellement dans l’apparition d’une sexualité omniprésente (le parcours de notre miss monde tourne autour de la ceinture, tout le temps, à chacune de ses rencontres, à tel point qu’elle en deviendrait une caricature de la Justine de Sade) et une association sexualité-friandise pour le moins… atypique. On sent qu’il y a une idée derrière cette association, mais elle s’est perdue dans le récit, et se retrouve soit sous forme de détails (un noir qui avant l’acte sexuel se compare à du chocolat, la folle fornique avec un marin dans un lit rempli de sucre…) ou de scènes pour le moins dérangeantes (la folle qui fait un strip tease devant des gamins de 8 ans suçant des sucreries, l’héroïne se caresse le visage d’un air ingénu contre un pénis, une scène d’exhibition de notre héroïne recouverte de chocolat (donnant un beau relent fécal à l’image)…). Sans que le sens de tout ceci ne soit exposé. Alors soit Sweet movie est une œuvre inaccessible, soit nous avons affaire à un beau numéro de masturbation intellectuel, un porno pour intellos voué à un public qui aime jouir du cerveau. Il y a toutefois des séquences fantasmes qui traversent le récit (un meurtre particulièrement graphique dans le bac à sucre, l’introduction dénonçant le show télévisés avec un excès complètement survolté) qui tendent à lui donner les qualités, qui stimulent l’adhésion (le marin faisant du stop sur une bouée avec son vélo). Mais finalement, l’excès de Sweet Movie tourne à vide, n’ayant rien d’autre à offrir qu’une orgie complète, qui culmine dans la fin du récit avec un remake de La Grande Bouffe à en faire passer l’original pour une comédie bon enfant. Quand il ne montre pas d’images d’archives de l’exhumation des victimes d’un massacre par des nazis (je n’ai toujours pas saisi l’utilité, mais c’est de l’art !). Flamboyant, mais creux, Sweet Movie est une sorte d’exception dans le paysage cinématographique, car il fait vraiment office de test cinéphile, de révélateur d’attachement à la forme ou au fond. Un must seen.

 

2/6


1974
de Dusan Makavejev
avec Carole Laure, Pierre Clémenti

 

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27 juin 2013 4 27 /06 /juin /2013 11:13

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Avec l’Imaginaerum, le groupe Nightwish se propose de mettre en image son album éponyme, en suivant à la fois l’histoire qu’ils illustraient dans leurs chansons et en brodant un peu pour parvenir au format standard d’une heure trente. En résulte un film forcément inattendu et assez extrême dans ses partis pris. Toutefois, il est possible d’affirmer que, tel qu’il se présentait, Imaginaerum est exactement ce qu’il avait l’air d’être vu de loin.

L’histoire : Thomas, chanteur de rock de profession, est plongé dans un coma depuis de nombreuses années. Alors que sa fille décide d’interrompre les soins médicaux dont il bénéficie, son esprit évolue dans un monde de rêve où se mêlent ses souvenirs.

 

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Présenté ainsi, l’Imaginaerum a tout d’un OFNI et peut prétendre au statut de film culte. Usant d’un surréalisme plutôt hérité de Gilliam, cet imaginaerum est toutefois moins foisonnant, moins pétillant et surtout plus numérique que son homologue britannique. Si l’imaginarium de ce cher Parnassus montrait quelques limites dans certaines séquences (la course en échelle, le décor qui s’effrite…), l’imaginaerum, quant à lui, sent vraiment le numérique dans toutes les images. Virtuellement, c’est beau, les décors très lisses sont soignés, mais tout cela manque de vie. C’est désincarné au dernier degré, alors que les films de Gilliam respirent. Et cette désincarnation n’est qu’une facette de ce qu’est finalement l’Imaginaerum : un clip d’une heure et demie dédié à Nightwish et à Tuomas Holopainen, le leaderdu groupe (et son précieux claviériste). Le film, sur l’ensemble de sa durée, échoue à créer la moindre profondeur. Dans le monde féérique, il tente de trouver la richesse dans un mélange de souvenir volontairement embrouillé, tournant autour de symboles facilement reconnaissables dans le monde réel et… C’est tout. On voit des liens, et c’est sensé remplir, être beau, donner du sens… Mais c’est finalement aussi désincarné que le monde réel que le film expose, qui est lui, disons le, absolument chiant. Le dilemme moral de la fille de Thomas ne nous émeut même pas (malgré une exposition intéressante), car à vrai dire, on dort devant ses longs dialogues avec sa mère. Vraiment, même en essayant de faire des efforts pour s’intéresser, la froideur de l’ensemble et la cristallisation complète des positions de chacun rend le spectacle complètement anesthésié. On pourrait même entendre un écho tellement c’est creux… Mes paroles assassines en viendraient presque à masquer la qualité formelle de l’ensemble, qui sonne faux mais qui bénéficie d’un soin léché (comme un clip, en somme). Mais pour ce qui est du reste, à moins d’être un fan de Nightwish (et de prendre ce film pour ce qu’il est à la base : une simple transposition en image d’un album), le spectateur lambda ne va rien bitter à ce qu’il va voir, ou plutôt il se sentira tellement peu concerné qu’il retournera bien vite chez les Pink Floyd et Alan Parker, les visions surréalistes de The Wall enterrant complètement cet Imaginaerum. L’envie de faire de la poésie est louable, elle se ressent d’ailleurs (notamment dans le bonhomme de neige monstrueux). Mais ici, on tient une poésie polie, qui préfère se lancer dans la belle image creuse plutôt que d’oser faire vraiment un film (et au jeu de la gratuité, à moins de ménager une ambiance captivante, je m'ennuie). En attendant la sortie de la bestiole, il est toutefois possible de préparer le terrain en écoutant l’album en question.

 

1,5/6


2012
de Stobe Harju
avec Marianne Farley, Quinn Lord

 

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25 mars 2013 1 25 /03 /mars /2013 21:49

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Dans le domaine des blockbusters, Zack Snyder est une pointure. Parfaite incarnation des désirs de la décennie 2000, à savoir contrer les produits bourrés d’effets spéciaux avec un scénario couillu, ses travaux ont tous laissé leur trace, que ce soit dans l’acquiescement général (L’armée des morts) ou dans la polémique (300, Watchmen). Malgré la petite baisse notée ces derniers temps (un Gahooles intéressant mais au final bien guimauve, un Sucker Punch vraiment intéressant, mais hélas trop j’me la pète), on attend Man of Steel de pied ferme, et plein d’espoir. D’ici là, on se concentre aujourd’hui sur sa seconde incursion dans le monde du comic book, à savoir Watchmen.

L’histoire : dans un passé réinventé (les années 80 sous le troisième mandat de Nixon), un membre d’une ancienne équipe de vigilante est assassiné. Alors que croît la menace d’une guerre atomique entre les capitalistes et l’URSS, l’un d’entre eux, Rorchach, tente de rassembler les différents membres de son équipe.

 

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Dire qu’on tient là un miracle dans le monde du blockbuster relève de l’euphémisme. Rarement projet aura été si ambitieux, et le prix de cette ambition se ressent aujourd’hui dans la polémique qu’il continue à susciter. Film de héros sans action qui s’intéresse plus à leur psychologie et leur parcours émotionnel, vision ultra pessimiste de l’humanité, établissement d’un mensonge à l’échelle mondiale avec exécution des dissidents, longueur non négligeable. Les reproches et les éloges sont légions (quand on en arrive au point où les fans du comic critiquent le film parce qu’il est l’adaptation presque parfaite du matériau, sans le développer ni s’en démarquer, on se rend compte de l’énorme travail de fidélité et de compression pour condenser une telle œuvre sur 2H30 (une version longue viendra diluer un peu le rythme, prenant davantage son temps pour développer ses personnages). Watchmen brasse un univers phénoménal, et par essence attractif. Mixage entre vintage 80’s et partis pris modernes (ralentis, effets spéciaux numériques…), il est formellement d’une beauté à couper le souffle, et sert d’écrins à une série de portraits plus ou moins psycho de nos différents personnages. 3 ressortent particulièrement. Le comédien, immédiatement magnétique car prompt à l’excès et assumant complètement sa monstruosité en usant d’un cynisme poussé à l’extrême et d’un humour noir révoltant, est d’ailleurs le premier à bénéficier d’une présentation. Il est en quelque sorte notre porte d’entrée dans ce monde où l’héroïsme tient plus de la pathologie psy que de l’envie de conserver l’ordre établis (sauf pour notre grand méchant, mais nous allons y revenir). Sa noirceur et son rire jaune en font probablement le personnage le plus marquant, au point de rendre son fameux smiley culte et reconnaissable d’entre mille. Le second personnage marquant est évidemment Rorchach. Véritable psychopathe passant son temps à vomir sa haine du monde et à user de la violence sur des personnes diverses, il est également fascinant dans sa principale contradiction, à savoir qu’il continue de vouloir œuvrer pour l’ordre alors qu’il ne cesse d’insister sur le dépérissement de ce dernier, gangréné par une corruption en pleine explosion. Connaissant son parcours humain monstrueux (une enfance traumatisante, le meurtre du pédophile…), le personnage, radical, assène sa vision du monde avec une telle insistance, une telle intensité, que le discours séduit, et qu’il en devient finalement très attachant. Le manichéisme est par essence séducteur, car l’idée est souvent simple, et trouve un champ d’application étendue, aussi un tel personnage, idéaliste à l’extrême usant de la violence la plus crasse, ne peut que marquer durablement. Enfin, le dernier personnage marquant, mon préféré, reste le docteur Manhattan. Véritable dissertation sur le parcours d’un homme devenu pratiquement Dieu (sans l’omniscience, une omission qui permet de le comprendre et d’envisager son point de vue, tout en ménageant le suspense de l’intrigue), il aborde tout un tas de thématiques comme la perte des repères humains comme la fuite du temps, l’importance de la vie, l’anesthésie sentimentale… Il donne la vision d’un dieu oubliant peu à peu qu’il a été homme, il renonce à s’intéresser à leurs enjeux, à leur monde malade (car il finit par mépriser de nombreux côtés humains lui aussi), et finalement il devient une menace pure et simple dans sa totale indifférence. Il est une vision païenne de la divinité particulièrement séduisante sur un plan psy, et se révèle être un sujet de dissertation passionnant (bien qu’il tienne finalement plus de la psychologie que de la théologie). Les autres héros sont nettement plus humains et nettement moins marquant. Un hiboux qui ne se sent viril qu’en costume et un spectre soyeux s’exhibant dans une tenue latex moulante, point barre. Le méchant n’est finalement que peu intéressant (un génie qui se sent seul, il serait temps de téléphoner au Kim Jong Il de Team America), le plan qu’il trace pour l’humanité est en revanche plus intéressant. Politiquement très incorrect, il fait le postulat qu’un gros mensonge impliquant le sacrifice d’une vingtaine de millions de personne et la coopération du docteur Manhattan (qui s’en fout) peut faire sortir le monde de la crise et le faire avancer dans la joie. C’est en effet une remarque intéressante, et dans un contexte de guerre froide poussée à l’extrême (à sa décharge, les missiles intercontinentaux étaient en préparation de lancement) et une porte de sortie séduisante sur le papier. Toutefois, même en déployant de tels moyens, ce plan apparemment parfait ne peut fonctionner. Après l’éclatement des deux blocs, c’est la menace terroriste qui est venue s’ériger comme grand ennemi, et qui a terrifiée le monde en se révélant difficile à localiser. Avec des conflits comme des revendications d’indépendance ou de fanatisme. Des guerres qui n’ont pas de lien direct avec les ressources d’énergie. Or ce beau plan est fondée sur le principe que la guerre est fondée sur la peur de manquer de sources d’énergie pour faire face. Il est donc très incomplet, et permet seulement de désamorcer le conflit bipolaire, créant une menace focalisant les attentions vers autre chose que la Terre et ses occupants. Le film s’arrête hélas avant que ces limites n’apparaissent, et nous laisse en compagnie d’un journaliste qui découvre la vérité dans le journal de Rorchach, s’achevant sur un dilemme qu’il aurait été intéressant de conclure (les vigilantes survivants choisissent de se taire, achetant leur conscience par un bonheur respectif (un mensonge comme ciment amoureux ? ^^)). En l’état, pour la virtuosité de la mise en scène et ses préoccupations aux antipodes du genre héroïque (on est dans un milieu nettement plus sombre qu’un The Dark Knight), Watchmen est une claque dans la gueule, un choc graphique et psychologique qui bénéficie d’un écrin soigné. On peut effectivement lui reprocher d’être long, bavard (le changement brutal de Manhattan évoquant les miracles est presque une arnaque métaphysique), manichéen et j’me la pète (ça va un peu de paire avec le statut de production friquée et le style Snyder), il aborde des sujets passionnants, il ose le politiquement incorrect, et il se révèle être une expérience cinématographique « autre », un statut durable dans le temps (contrairement à 300 qui lui a été réévalué depuis). Un monument dans son genre.

 

5,2/6

 


2009
de Zack Snyder
avec Jackie Earle Haley, Patrick Wilson

 

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25 mars 2013 1 25 /03 /mars /2013 18:47

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Pour les chanceux et les cinglés qui ont vu Subconscious Cruelty, il semble évident que Karim Hussain est une personnalité à suivre. Axé sur l’expérimental trash, ce réal imprévisible revient avec une copie encore plus jusqu’auboutiste : Ascension. Mais le jusqu’auboutisme n’est pas dans la violence, il est plutôt dans l’ambiance et l’hermétisme du résultat final. Assurément son travail le plus sujet à polémique.

L’histoire : Dieu est mort, et ses pouvoirs sont retombés sur terre, dans toutes ses créations vivantes. Désormais capables d’accomplir des miracles, l’humanité s’est auto-exterminée. Seules trois femmes tentent de monter tout en haut d’une interminable usine pour fuir ce monde de désolation.

 

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Vu l’incroyable pessimisme et le jusqu’auboutisme d’un tel pitch, Ascension a l’air passionnant. Et il l’est, à bien des niveaux. Comme toujours, Hussein foisonne d’idées trash poétiques, et le thème d’une humanité ayant accès à une forme de magie l’inspire énormément. Toutefois, contrairement à Subconscious, Ascension n’est qu’une seule histoire, qui suit trois rescapées qui ont chacune vécue horreur et souffrance. On ne sortira donc jamais de l’usine, gigantesque bâtiment silencieux et véritable dédale d’escaliers qui montent tous vers l’inconnu. Autant dire qu’il y a immédiatement une portée métaphysique qui s’installe, la destination de cette ascension demeurant mystérieuse. Si Dieu est mort, qu’y-a-t-il en haut ? Nos trois personnages sont partis pour le découvrir, et l’essentiel du film consiste à suivre leur ascension, à disserter sur leurs motivations pour continuer à avancer, à éplucher leurs espoirs, leur peine… Et l’occasion de remarquer qu’elles vieillissent de façon accélérée pendant leur montée, finissant littéralement en lambeaux dans les dernières marches. Je le répète, le film se révèle surtout fascinant pour sa poésie trash, s’attardant par exemple sur le passé de l’une des femmes, tuée et ressuscitée à de multiples reprises par son ancien compagnon. Un tel concept, une telle spirale de violence gratuite (si on ressuscite, la mort et la violence n’ont plus de raisons d’être réprouvés) aborde des thématiques fascinantes et sonde la noirceur humaine avec toujours cette poésie qui fait l’horreur des films d’Hussain. Une autre dissertera sur les enfants dieux, humains non finis qui se retrouvent à l’égal des hommes sans l’expérience, répétant les erreurs sans se donner la peine d’apprendre… Je reste personnellement sur la magnifique séquence tournée dans un champ où deux filles jouent à se poursuivre, la caméra les perds de vue un instant, et quand elle les retrouve, l’une est en train de battre à mort l’autre. Gratuit, mais la mise en scène et l’ambiance rendent la scène fascinante. Toutefois, et il est très important de le préciser, le maître mot du film est : « léthargie ». En effet, l’essentiel du film consiste donc à filmer des femmes qui montent dans un escalier et qui font des pauses de temps à autre pour parler chiffon. Pendant 1H42. Si vous contrôlez sur allociné, le nombre de mauvaises critiques décrivant un film chiant est éloquent. Effectivement, Ascension est chiant, à un tel point qu’il est polémique essentiellement pour ça. Est-ce de la masturbation intellectuelle trash ou une véritable œuvre poétique ? Je penche personnellement pour la seconde hypothèse, j’adhère au style Hussain. Toutefois, le réalisateur ne faisant aucun effort pour s’ouvrir au public (il va à fond dans son trip), cette mise en scène très théâtrale et lente peut passer pour de la prétention. Hussain s’en fout, il a conscience d’être borderline et ne pense qu’à épaissir son poème pelliculaire de visions macabres (les innombrables cadavres qui ont eux aussi tenté l’ascension métaphysique de l’usine). Nouvelle claque sensorielle qui nécessite vraiment d’être en forme pour être suivi jusqu’à son terme (je me suis endormi deux fois devant avant de parvenir au bout, magnifique musique hypnotique), Ascension est plus construit que Subconscious, il a une identité mieux définie aussi (ce n’est plus un attentat à la raison, c’est un regard pessimiste sur l’Homme), et il se révèle à la hauteur des attentes. Attention toutefois, l’objet est tel qu’il provoquera certainement des pétages de câbles devant l’inexistence d’un quelconque rythme…

 

 

5/6

 


2002
de Karim Hussain
avec Marie-Josée Croze, Barbara Ulrich

 


 
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13 janvier 2013 7 13 /01 /janvier /2013 13:59

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Il y a des films qui vous font aimer le cinéma. Ce sont les OFNI, les trucs jamais vu et qui s’affranchissent des codes de narration classique pour se lancer dans leur trip. Symbol est un de ceux là, un trip de ouf malade qui, à l’aide d’un concept, parvient à faire l’accession au pouvoir divin la plus absurde jamais faite. Dupieux peut retourner faire de la comédie française !

L’histoire : Alors qu’au Mexique se prépare un petit match de catch insignifiant, un homme se réveille dans une étrange pièce toute blanche, parsemée d’une infinité de zizis d’angelots…

 

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Symbol a cela de fantastique : en partant sur des bases complètement vierges, il parvient à étirer sur 1h40 un concept simple et à nous faire avec sans demeurer trop répétitif. Le début a pourtant de quoi dérouter. Notre homme, enfermé dans une salle blanche sans porte et sans plafond, le trouve pour seul relief qu’un zizi sur l’un des murs, finissant par l’effleurer, des milliers d’anges se mettent à sortir des murs, avant d’y disparaître en laissant poindre leur membre. Déjà, le personnage pète un câble, et on est mort de rire. Puis il se rend compte qu’en appuyant sur ces zigounettes, il peut faire apparaître différents objets dans la pièce. Un excellent concept qui permet donc de s’amuser sur quelques questions de base (manger, boire…). Jusqu’à ce qu’un bouton ouvre une porte dans le mur à l’autre bout de la pièce, mais dont l’ouverture est minutée. Et c’est en rajoutant sans cesse des difficultés et en se montrant créatif que notre personnage prépare son évasion. Maniant sans cesse un humour absurde qui a l’avantage de ne pas devenir lassant, Symbol avance sans cesse, et impossible de se préparer à ce qu’il va arriver par la suite. D’ailleurs, le film ne donne aucunes explications. Est-ce un test (on pense au Cube de Nathali) ? Le lien avec le match de catch se révèle tardif, mais il est déterminant pour montrer que les actions de notre personnage dans la pièce aux zizis commencent à avoir des répercussions sur le monde extérieur. On n’en dit pas plus, mais le dernier quart d’heure, purement expérimental et nous donnant une pêche d’enfer, nous emmène là où l’on n’imaginait pas aller. Et, soit dit en passant, ce film est le premier à oser montrer… la teub de Dieu himself. Enorme séquence absurde à s’en décrocher la mâchoire ! Enorme surprise qui se rend immédiatement attachante auprès du spectateur pour son humour vraiment absurde, Symbol est à recommander chaudement à tous les amateurs de chocs visuels. Ce film (comme les autres réalisations de Matsumoto) est difficile à trouver sur le net, et encore, en VO (japonais) sous titré anglais. Pour en profiter, peut être faudra-t-il attendre quelques temps. Mais le potentiel du film n’en est pas moins là. Un vrai phénomène.

 

4,7/6

 

2009
de Hitoshi Matsumoto
avec Hitoshi Matsumoto, Luis Accinelli

 

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29 septembre 2012 6 29 /09 /septembre /2012 16:02

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Dead end est un petit film qu'on pourrait qualifier de fauché, à en juger par la maigreur de ses effets et son casting plus ou moins connus. Mais il s'agit là d'une oeuvre potentiellement culte, et clairement apte à divertir à condition de bien comprendre à quel voyage nous sommes convié.

L'histoire : en pleine nuit de noël, une famille sur la route de la maison de grand mère est témoins d'étranges évènements...

 

http://www.top10films.co.uk/img/Dead-End.jpg

 

Tel est le pitch minimaliste de ce road movie métaphorique que n'aurait pas renié David Lynch. C'est simple, le film commence simplement comme un film culte, misant tout sur des personnages dont on saisit tout de suite l'essence, qui à l'aide de dialogues savoureux deviennent vite nos compagnons de traversée. C'est assez enthousiasmant de voir qu'on se met tout de suite sur la même longueur d'onde qu'eux, entre un père très masculin, une mère vivace, un petit frère gothique rebelle, une soeur blonde psychologue et un petit ami sportif. Vraiment, l'étude de caractère, trempant dans le cliché, nous comble avec un humour bienvenu jusqu'à ce que les premiers incidents arrivent. Après un accident manqué de peu, notre famille commence à voir une mystérieuse femme blanche rôder autour de leur voiture. Mais qui est cette mystérieuse femme ? On pense d'abord à une équipe de serial killer (une mystérieuse voiture funèbre passe avec toujours un membre de la famille gesticulant dans le coffre), avant de se rendre compte que c'est plus compliqué que cela. Ou plutôt plus simple. En effet, pour ceux qui savent reconnaître ce genre de film, Dead end est une sorte d'épisode étendu de la 4ème dimension. Un trip lynchien qui évoque un traumatisme par des biais métaphoriques qui s'étendent sur toute la pellicule. En cela, le film ne recèle aucune surprise (j'ai éventé le phénomène 15 minutes après le début du film). Mais le traitement des personnage tout au long de l'aventure, le côté trash et traumatisant de cette dernière (les morts, bien que suggérées, sont gerbantes), nanti d'une ambiance flippante (la radio d'où sortent des cris de bébé sur fond de litanie morbide) qui provoque clairement le malaise par moment. Le script est également assez intelligent pour conserver les caractères les plus sympathiques le plus longtemps possible, nous développant une relation père fille vraiment touchante, supportée par de sublimes acteurs. Malgré un faible budget, le film ne semble jamais cheap (il n'a pas besoin d'avoir recours à l'esbrouffe), et ses acteurs sont suffisamment investis pour rendre le spectacle très vivant (Ray Wise est d'un charisme rare). Relance oblige, le dénouement laisse une petite trace fantastique pour brouiller les pistes, mais nous ne sommes pas dupes, nous venons bel et bien de suivre un coma d'accident de la route tout ce qu'il y a de plus Lynchien. Au final, Dead end réussit clairement à planter une ambiance et à faire un road movie métaphorique  intéressant, et bien plus intéressant que Reeker. Et ça, on aime.

 

4.5/6

 

2003
de Jean-Baptiste Andrea, Fabrice Canepa
avec Mick Cain, Ray Wise

 

http://www.cinemotions.com/scripts/slider/image_sorties_id.php?id_image=25345

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3 septembre 2012 1 03 /09 /septembre /2012 11:40

http://www.1kult.com/wp-content/uploads/120301_angoisseaff.jpg

Interdit aux moins de 16 ans

 

Angoisse de Bigas Luna est un film ressorti récemment en pack avec Mad Movie n°250. A première vue, l’histoire se focalisant sur un médecin oculaire qui prélève les yeux de ses patients peut apparaître comme banale. Mais après 20 minutes, le film opère un virage brutal qui vient le propulser dans la catégorie des OFNI, le jeu opéré par le réalisateur se révélant tout simplement passionnant.

L’histoire : Un médecin vivant chez sa mère tue sous son influence ses patients avant de prélever leurs yeux. Jusqu’à ce qu’on se rende compte que ce film n’est pas forcément le film…

 

http://img.over-blog.com/550x366/0/47/60/48/Blog/201202/angoisse.jpg

 

Ce qui est génial avec Angoisse, c’est qu’on ne sait jamais vraiment à quoi s’attendre. Le voir au cinéma est clairement la meilleure condition pour assister au film, car la moitié de son intrigue se passe dans un cinéma. Tout d’abord, l’histoire commence avec un médecin ventripotent qui prépare des lentilles pour les clients d’un ophtalmo. L’ambiance de son foyer est gentiment malsaine (elle rappelle un peu celle de The Human Centipede II), jusqu’à ce que le film commence à virer sur la bizarrerie, au cours d’une étrange séquence où la mère se livre à une séance d’hypnose sur son fils. Le thème de la spirale devient alors récurrent, ce qui explique la présence d’escargots dans le film et d’un coquillage. Notre médecin hypnotisé se rend alors chez sa dernière cliente, la tue et prélève ses yeux. C’est pendant cette séquence gore que l’on découvre que cette histoire est un film projeté dans un cinéma. Et que plus le film avance, plus les spectateurs sont mal à l’aise, certains éléments du film se retrouvant dans la salle. On pense d’abord à une sorte de remake de Démons en plus ampoulé, mais la suite du film innove largement. En effet, dans le film du film, le médecin se rend dans une salle de cinéma (où est projeté Le monde perdu de 1916, sympathique film d’aventure), avec la ferme intention de tuer tous les spectateurs. Ainsi, on suit deux niveaux de réalité différents (en plus de la réalité qui veut qu’on regarde ce film) : les spectateurs dans une salle de ciné qui regardent le médecin faire un carnage dans une salle de ciné. Mais alors que les égarements sanglants du médecin commencent, un des spectateurs regardant le film se révèle être un dérangé qui imite le comportement du médecin, à la différence qu’il possède un revolver chargé. A partir de là, Bigas s’essaye à plusieurs mécanismes de peurs à la fois, ajoutant sans cesse de nouvelles pistes à son film pour en faire une œuvre à la fois dérangeante et fascinante. On le dit tout de suite, le film est déstabilisant pour ses différents niveaux de réalités (qui sont toutefois très bien organisés, il n’y a pas une seule incohérence ou ambiguïté à ce niveau) et par la densité de ses effets. En termes d’ambiance, cette Angoisse est l’une des plus perturbantes que j’ai pu voir récemment (ce qui doit expliquer l’interdiction aux moins de 16 ans du film). Toujours est-il qu’en plus d’un gore chirurgical, Angoisse repose sur des acteurs tous excellents, on remarquera notamment les deux adolescentes spectatrices qui remarqueront le manège du psychopathe au silencieux. Nanti d’un bon suspense jusqu’à son dénouement (le générique est une nouvelle mise en abîme des niveaux de réalité qui prend tout son sens dans une salle de cinéma), Angoisse est une très bonne surprise, à découvrir d’urgence.

 

4.8/6

 

1987
de Bigas Luna
avec Zelda Rubinstein, Michael Lerner

 

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12 août 2012 7 12 /08 /août /2012 10:49

http://www.cf-network.com/cfan/IMG/jpg/La_saveur_de_la_pasteque_06.jpg

 

Un véritable OFNI aujourd'hui avec La saveur de la pastèque, film asiatique assez barré dans son concept filmique qui consiste à faire dans la pornographie potagère couplée à la comédie musicale. Même si on a du mal à saisir l'intérêt de l'entreprise, le résultat contient une certaine beauté esthétique qu'il serait intéressant de développer.

L'histoire : une femme seule se sent attirée par un des colocataires de son immeuble, acteur de films pornographiques à base de pastèques et plus sensible que son métier ne laisse paraître...

 

http://medias.unifrance.org/medias/193/28/7361/format_page/la-saveur-de-la-pasteque.jpg

 

Les instants de bravoure (si on peut les appeller comme ça), La saveur de la pastèque en contient des tas. Il n'y a qu'à voir le début, où nous assistons à une scène de pornographie classique, sauf qu'ici, les organes génitaux féminins sont remplacés par une pastèque. Ce qui laisse apprécier un décalage assez bizarre pendant toute la scène où notre acteur porno s'amuse avec un légume alors qu'une fille gémit en cadence. Passé cette intro déroutante, on nous présente le personnage féminin de l'histoire, une femme seule qui elle aime la pastèque pour la manger, mais aussi pour l'impression d'être enceinte quand elmle en tient une contre son ventre. C'est clair, on sent la solitude de la dame, jusqu'à ce qu'elle croise dans son immeuble le fameux acteur. A partir de là, c'est une comédie romantique quasi muette à laquelle nous somme conviés, sauf qu'elle cultive une façade trash avec l'emploi du jeunot (on suivra ainsi une séquence porno arrosée de jus de légume). Et là, sans crier gare, notre acteur déguisé en sirène se met à pousser la chansonnette dans le château d'eau de l'immeuble. A partir de là, la narration est fréquemment interrompue par des chorégraphies chantées qui mélangent les champs lexicaux de l'amour et du potager. Si ces séquences complètement what the fuck viennent interrompre le récit, ils sont néanmoins bien étudiés, souvent sympathiques dans leurs délires colorés, mais sincères (on est loin des artifices des comédies musicales type High School Musical). Niveau intrigue, c'est clair comme de l'eau de roche : on assiste au rapprochement progressif de nos deux protagonistes avec des scènes quasiment muettes, un défi moyennement réussi, certains épisodes paraissant longs. Mais la recherche esthétique du film tend à faire passer ses délires érotico-végétariens pour une métaphore plus qu'explicite du sexe sans franchir la barre des 18 ans. Au final, si on lui enlève sa métaphore et ses scènes de comédie musicale, le film s'assimile à un banal coup de foudre qui se mue en amour. Mais le film semble surtout s'intéresser à la libido de nos deux tourtereaux, et tient dans son esthétique du jamais vu. Toutes les chansons ne sont pas du même niveau, mais esthétiquement en et termes de sonorité, le tout s'agence bien au milieu du film. Un très curieux objet au final, plutôt bien fait, mais à destination de quel public ?

 

3/6

 

2004
de Tsai Ming-liang
avec Lee Kang-sheng, Shi Chen

 

http://www.linternaute.com/cinema/image_cache/objdbfilm/image/540/9699.jpg

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28 juin 2012 4 28 /06 /juin /2012 09:08

http://imworld.aufeminin.com/cinema/tetsuo-888_L.jpg

 

http://images.fan-de-cinema.com/affiches/science_fiction/tetsuo_ii_body_hammer,0.jpg

 

bulletman.jpg

 

Shinya Tsukamoto est reconnu comme réalisateur de films punks, à tendance expérimentale, et ayant fréquemment recours à la violence. De toutes ses œuvres, Tetsuo est largement la plus citée, faisant office de monument au panthéon des films expérimentaux, et partant du postulat démentiel de voir un homme se transformer définitivement en machine. Après un premier film incroyablement percutant (un choc lors de la découverte), Tsukamoto décide de se lancer dans une fausse suite en 1992, Tetsuo 2, The body hammer, qui si il reprend le même univers, va traiter son sujet plus sous un angle d’action / film de fou japonais (Meatball Machine semble venir de là). Ce n’est plus une œuvre expérimentale agressive, mais un film cyber punk incontestablement jouissif (c’est d’ailleurs celui qui est le mieux filmé). Et alors qu’on se délectait encore de ces deux perles, voilà que le projet Tetsuo 3, The Bullet man sort pratiquement à l’improviste. Dans ce dernier film, une envie de lisser un peu les contours, même si le résultat final tient globalement plus du 2 que du 1. Les séquences expérimentales sont ici plus rare, éliminées au profit de l’action qui donne par moment carrément dans la gunfight. Toutefois, les accélérés sont beaucoup plus frénétiques, et on peut dire que c’est cette frénésie qui vient redonner du peps à un Tetsuo 2 parfois plus mou. La rage est de nouveau au cœur du film, ce qui fait de ce cru une redite esthétisée et pas déplaisante.

 

http://img.over-blog.com/600x480/2/21/59/58/Essai-40999/vlcsnap-2011-01-11-21h35m15s70.png

 

Testuo : Voici un film qui aura hypnotisé on ne sait combien de cinéphiles (pouvant endurer le style expérimental), puisque la force de ses images suffit à motiver le spectateur pour le suivre pendant une heure. Mais quelle heure ! S’appuyant sur une métaphore simple mais efficace (l’homme concassé par la société qui devient une machine), et qui va nous faire partager un véritable trip punk, gore et ultra violent. L’introduction plante d’office les obsessions esthétiques du film : des câbles électriques qui pendent, de la graisse sur les murs, une sensation étouffante de confinement et des décors d’usine. Un inconnu se mutile pour s’enfoncer un tuyau dans la jambe (on voit sur ses murs des dizaines de photos de sportifs, ce qui laisse planer l’idée que l’homme cultive une quête de performance chez le corps humain), avant de piquer un 100 mètres et de finir percuté par une voiture. Arrive la séquence de présentation de notre personnage principal : un gars en costard qui bosse dans un bureau et qui semble ici secoué de gestes désordonnés (une sorte de rage) sur une musique au rythme industrielle. C’est parti. On suit alors le quotidien de ce cadre, complètement formaté à une existence codifiée, méticuleusement pensée et qui ne cède jamais à la moindre folie. La scène devant le miroir, première saillie gore, sera le premier élément perturbateur de la journée du héros. S’ensuit une longue conversation entre notre homme et sa maîtresse, à qui il répète inlassablement la même chose en pensant à ce qu’il pourrait lui faire, sans pour autant passer à l’acte. C’est seulement après que la première manifestation machine organisme aura lieu, sous la forme d’une femme au poignet infecté. Cette scène sera d’ailleurs la première où on découvrira qu’une sorte de démon planqué dans la mécanique (l’instinct ?) investira les corps qui se transforment en machine. Ce premier contact, violent (arrachage d’oreille, plantage de stylo dans la gorge…), laisse entrevoir les futurs séquences marquantes de Tetsuo, à savoir ces fameux plans séquence accélérés où le protagoniste se déplace à toute allure dans les rues de la villes. Au cours de l’affrontement avec la possédée, notre personnage est à son tour contaminé par ce démon mécanique. Commence alors la transformation physique et psychique du héros, qui passe de l’état de victime à celui de monstre. Pour le pétage de câble, on prendra comme référence la séquence où le héros, impuissant, se fait sodomiser par un démon féminin arborant un gigantesque tuyau en guise de phallus. Niveau symboles sexuels, le film ne dose pas ses effets, ne perdant jamais une occasion de revenir à ces symboles pour conserver l’impact viscéral de l’œuvre. Mais cet impact est sans cesse entretenu par la transformation progressive de notre homme en machine, ce dernier arborant bientôt une monstrueuse perceuse à la place de son sexe (sa partenaire, véritable bête de sexe que notre homme ne va pas ménager, en fera les frais). Et bientôt, c’est l’amalgame chaotique entre chair et métal, où tout n’est plus que tuyaux et muscles. Passé ce stade, c’est carrément le mobilier qui se transforme, réorganisant les objets, fusionnant les êtres vivants présents dans les environs (on aura le cas du chat fusionnant avec des ustensiles électro-ménagers et des aliments)… A ce stade, l’incarnation du démon mécanique ne nous surprend plus, mais les séquences qui suivent, graphiquement très fortes, nous conduisent tout droit à la confrontation finale dans un enchevêtrement de câbles, où notre héros mécanique et le démon fusionnent pour former un gros tank qui projette de détruire le monde. Tetsuo, c’est une ambiante démente, dynamisée par une bande originale ultra dynamique et dont les obsessions graphiques accouchent d’une ambiance malade fascinante. N’ayant jamais vu le film en sous-titré, les dialogues restent donc une énigme pour moi. Mais ils me semblent dispensables au vu de la force des images et de la musique, qui créent un extra-ordinaire univers avec peu de chose. Une saga est née.

 

5.5/6

 

1988
de Shinya Tsukamoto
avec Tomoro Taguchi, Nobu Kanaoka

 

http://storage.canalblog.com/66/82/415050/75612285.png

 

Tetsuo 2, the body hammer : Après le succès de Tetsuo, Tsukamoto envisage une suite lorgnant vers quelque chose de différent. Moins violent en tout cas, car le premier constat que l’on puisse faire, c’est que la dimension sexuelle de Tetsuo 2 est très mince. En dehors de quelques plans suggestifs, finie, les séquences de sexe énervées du héros devenant machine. Toutefois, c’est toujours un personnage masculin qui sera au centre de l’histoire. Mais ce n’est plus exactement un brûlot tapant sur l’aliénation d’un individu. Certes, le portrait de famille typique propre sur elle et la carrure du père (homme rangé, conscient de ses responsabilités…) apparaissent comme des gens normaux, un échantillon de masse sans grande aspérité. Mais au cours d’une sortie course, leur fils se fait enlever dans le métro par deux punks (semblant s’être échappés de la matrice), qui font en même temps une injection brutale au père de famille. S’ensuit alors une course poursuite énervée, la caméra bouge beaucoup, mais l’action reste lisible. Le père de famille sera alors considérablement malmené, sans pour autant que la transformation attendue n’apparaisse malgré le traumatisme. Après cette introduction violente, le père tente de se donner une constitution physique plus robuste (sa façade chétive commence un peu à reculer). Mais lors de la seconde tentative d’enlèvement, et de la mort du gosse en question, que la rupture a lieu (une séquence expérimentale assez bien faite). En pleine transformation, notre héros est alors capturé et emmené dans une sorte d’usine où s’activent d’autres personnes comme lui. C’est alors qu’on comprend qu’il s’agit d’une expérience sur la fabrication d’armes humaines, des hommes qui sous l’impulsion de leur rage, pourrait transformer leur corps en arme (c’est la conclusion de Meatball Machine). S’ensuit alors l’évasion de notre body hammer (qui massacrera quelques autres sujets d’expérience moins motivés). Mais à son retour, sa femme brisée (qui le tient pour responsable de la mort de leur enfant) viendra encore renforcer les sentiments contradictoires qu’il éprouve. Mais très vite, l’enlèvement de sa femme vient relancer l’action. Décidément, Tetsuo II marche comme une machine, et il ne veut jamais s’arrêter. S’amorce alors le retour dans l’usine. Au fur et à mesure de ses combats, il se rapproche peu à peu de ses origines, son passé étant inconnu avant ses 8 ans. On en apprendra alors un peu plus sur le chef des hommes armes et sur l’enfance de notre héros, au final cobaye depuis ses plus jeunes années et pouvant être sujet à des crises dévastatrices lors de ses vagues de colère. Le final perpétue alors la tradition tetsuo, organisant cette fois ci un défilé autour du char formé par notre homme, et escorté par tous les autres hommes-armes qui gravitent autour. Si le champ expérimental du film s’est considérablement réduit, Tetsuo II continue de cultiver cet amour pour un univers bruyant, glauque et sale qui semble affranchir les individus de toutes leurs entraves (ce qui passe par la destruction de leur quotidien). Moins hypnotique que son prédécesseur, cet opus propose toutefois quelque chose de différent, élargit un peu son univers et développe des idées intéressantes, qui serviront de base à l’excellent Meatball Machine qui doit beaucoup à ce film.

 

4.7/6

 

1992
de Shinya Tsukamoto
avec Tomoro Taguchi, Nobu Kanaoka

 

tetsuo-786.jpg

 

Tetsuo, the bullet man : première surprise, Tetsuo the bullet man n’est pas une suite, c’est un remake ! Passé l’angoisse devant cette première constatation, on remarque que Tsukamoto soigne ici beaucoup son esthétique. Celle-ci est glacée pendant l’essentiel du film, il n’y aura que pendant les gunfight qu’on aura droit à un peu de jaune et de rouge. Mais l’ensemble de l’œuvre est cohérente à ce niveau, la teinte bleue de l’ensemble du film parvenant à planter quelque chose de net. La trame de l’histoire est maintenant classique, mais les imperfections de Tetsuo 2  sont ici corrigées. On commence une fois encore avec une famille troublée par des cauchemars, mais unie. Notons d’ailleurs que notre héros est ici un occidental, une première dans la saga. Sortant avec son gamin pour se promener, ce dernier est volontairement heurté par un pystérieux chauffard, qui le traîne sur 50 mètres. Le choc est brutal, et c’est le premier pétage de câble (graphiquement, c’est le même que l’introduction de Tetsuo I) et l’amorce de l’histoire. Le chauffard s’étant enfui, la femme de notre héros ne cesse de le harceler moralement pour qu’il venge la mort de leur gamin. Notre homme sent ses nerfs qui se tendent un peu plus à chaque heure. Mais la transformation ne commence que lorsque sa femme le quitte. C’est alors que débarque un tueur qui abat froidement notre héros en pleine métamorphose. Son corps est récupéré alors par le chauffard qui avait écrasé l’enfant quelques jours plus tôt. Notre héros (qui en fait n’était pas mort), s’attaque à la voiture, empli d’une rage qui n’a d’égale que la puissance de la musique de la scène. Autant dire qu’il massacre littéralement la bagnole en métamorphosant son corps. Dès sa première transformation, c’est la machine à tuer. Différence notable avec Tetsuo II : une fois transformé, la métamorphose semble se maintenir. Sous cet état, notre héros devient de plus en plus instable, étant sujet à des crises de frénésie qui seront filmées avec une hargne rare. Les gunfights sont difficilement lisibles (la caméra bouge vraiment dans tous les sens), mais on sent qu’une énergie phénoménale circule dans le film, accompagnant le personnage dans sa quête de vengeance et de son passé. Concernant ce dernier, on ne sera pas vraiment surpris d’apprendre que son père était scientifique et qu’il a servi de cobaye lui aussi à des expériences d’armes humaines (le projet tetsuo). Toutefois, le héros bénéficie ic d’un maquillage qui évolue constamment au cours du film, finissant par ressembler à un monstre insectoïde recouvert de métal, et osant dans son dernier acte devenir une arme de destruction ultime : carrément une bombe H ! Carrément plus puissant que les autres films. Cependant, ce nouveau Tetsuo, à part soigner son esthétique, ne s’est pas lancé dans des thèmes nouveaux, et n’a pas vraiment inventé la poudre. Toutefois, il mérite vraiment qu’on s’intéresse à son cas, au moins pour un épilogue qui nous ramène au point de départ (chose complètement hors de propos pour Tetsuo 1, et qui était à peine esquissée dans Tetsuo 2). Le calme après la tempête ? Toujours est-il que la beauté de ce nouveau chapitre mérite largement qu’on s’y égare, et que le traitement de Tsukamoto restant aussi enragé que pour ses autres oeuvres, s'en priver serait un péché mortel. Démentiel !

 

5/6

 

2009
de Shinya Tsukamoto
avec Eric Bossick, Akiko Monou

 

http://www.brutalashell.com/wp-content/uploads/2011/01/TETSUO-THE-BULLET-MAN-III.jpg

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  • Je suis étudiant en Oenologie, j'ai 25 ans et je m'intéresse depuis quelques années au cinéma (sous toutes ses formes, y compris les plus tordues). Bienvenue sur le blog d'un cinéphage exotique.
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