L’animation européenne s’est toujours faite un peu rare dans nos rayons dvds, et c’était aussi le cas dans les années 80 (avec les supports vhs). Quoiqu’il en soit, cette facture technique relativement rare est une alternative à un budget moyen pour des ambitions artistiques excessives. Et Gandahar entre très bien dans cette catégorie. Si l’ambiance en général est moins sophistiquée qu’un excellent La planète sauvage, elle conserve notre attention d’un bout à l’autre du récit, et nous comble sur le plan de la symbolique et du sentimental.
Le début de cet ovni : On nous présente d’abord la civilisation des gandahariens, un peuple paisible où il fait bon vivre. Après plusieurs plans permettant de complètement dépayser le spectateur tout en attirant son attention sur le calme de la situation, nous assistons impuissants à la pétrification des gandahariens présents sur les lieux. Adultes, enfants, personne n’est épargné. Alertée par ce fait inhabituel, la reine Ambisextra (le personnage sur l’affiche) confie à Sylvain la mission de découvrir quel est la cause de cette catastrophe.
Totalement atypique (bien que plus tourné vers l’action que sur les ambiances comme l’était La planète sauvage), Gandahar faisait tout d’abord craindre une relecture de Yellow submarine (leurs débuts sont identiques dans les faits). Mais rapidement, nous prenons un chemin totalement différent, qui se rapprocherait plus de l’héroïc fantasy, dans un univers bancal et fascinant. Nous vivrons avec Sylvain un long voyage, plutôt intéressant au niveau de ses rencontres (son histoire d’amour avec Arielle, le peuple des Transformés, honteux descendants de la race gandaharienne), et mettra à jour une menace plutôt inattendue, tant elle contraste avec les ambiances qui étaient ici développées. Sans vraiment spoiler cette découverte (visible sur l’affiche), il s’agit d’une attaque de robots humanoïdes, qu’on imagine bien être une métaphore de la dictature. Broyant les gandahariens et les transformant à leur tour en robots. Le chef de ces derniers n’étant rien de moins que le Métamorphe, un amas cellulaire gigantesque, un Dieu organique particulièrement intéressant lors de ses dialogues avec Sylvain (au niveau des ambiances, on se croirait dans une version animée du Voyage fantastique, en mode expérimental : Arielle et Sylvain flottent sur des globules rouges en remontant dans ce gigantesque organisme alors qu’ils discutent avec ce dernier). Au final plutôt poétique (Sylvain n’achèvera le Métamorphe que quand il sera prêt à mourir), Gandahar peut se vanter d’être un claque visuelle. Une véritable expérience, qui là encore ne pourra être comprise que si elle est vécue. Dans mon cas, elle s’est révélée d’un enrichissement inattendu, et cela sous un angle plus rythmé que la moyenne.
5/6
de René Laloux
avec Pierre-Marie Escourrou, Catherine Chevallier
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