Godzilla s’annonçait d’office comme le premier gros film de l’été. Blockbuster massif qu’on attendait comme le messie après le reboot assez médiocre de Rolland Emmerich (à la francophobie plutôt marrante, on n’est pas peu fier d’avoir balancé une vérole de cette taille sur le maître du monde, espérons qu’on fera mieux la prochaine fois). Les trailers impressionnants nous ont tous scotché, et les yeux grands ouvert, on se prépare à en prendre plein la gueule. Hélas, Pacific Rim est déjà passé par là, et c’est bien dur de l’égaler…
L’histoire : en 1999, suite à l’effondrement d’une carrière d’uranium, un gigantesque squelette antédiluvien est découvert, ainsi qu’un organisme vivant incomplet. Une partie semble s’en être détaché et avoir disparu dans l’océan. Quelques mois plus tard, un accident nucléaire a lieu sur une centrale japonaise. Un des ingénieurs, certain de ne pas avoir eu affaire à une catastrophe naturelle, commence à chercher des réponses.
Godzilla 2014 n’est pas ce à quoi on s’attendait. A ce jeu, les bandes annonces ont été plutôt malignes, et ce fait m’incite à apprécier ce blockbuster bien gros. En effet, les plans qui apparaissent dans la bande annonce ont été retouchés pour la promo (des éléments ont été enlevés), afin de ménager quelques surprises pour le spectateur. Ceux qui s’attendaient à seulement Godzilla en auront pour leur argent. Je vais tenter de garder le secret (qui sera spoilé d’ici deux ou trois jours par des chroniqueurs moins scrupuleux), mais le scénario plutôt astucieux ménage quelques effets qui témoignent de la générosité du bestiau, et surtout du retour aux sources qu’il constitue. C’est un vrai film de Kaijus à l’ancienne, avec le Godzilla et l’adversaire à sa mesure, le numérique remplaçant les maquettes et assurant le gigantisme de l’entreprise, en l’auréolant d’un réalisme qui augmente le plaisir des luttes colossales auxquelles nous sommes témoin, à notre échelle. Là où on peut louer le film, c’est qu’il ne cherche jamais à cacher ses monstres, et nous en donne tout le temps à voir. Les séquences à effets spéciaux pullulent, nous comblant largement de ce point de vue. Les longues scènes de remplissages des homologues japonais sont remplacés par une intrigue rythmée, qui avance sans cesse des éléments (les images d’archives servent de générique au film, encore une manière de nous en donner à voir dès le départ) et suit efficacement l’action (le plan des militaires est parfaitement suivi). Il y a toutefois un petit malaise au niveau des personnages. Si celui joué par Bryan Cranston a un charisme immédiat, il est beaucoup trop vite remplacé par son fils, incroyablement fade et nettement moins intéressant. Mais comme il est militaire (Hou ha !), il nous permet une immersion au cœur de l’action, et cela, on l’en remercie. Enfin bon, on s’en fout, quoi. Vu qu’on est là pour les gros monstres et les scènes de démolition. Fort de ce retour à l’ancienne, on accumule les explosions et les grattes ciels effondrés (surtout ne pas penser au 11 septembre), avec des petits enjeux écologiques discrètement éparpillés qui s’intègrent très bien à la trame de l’histoire. Une bonne façon d’attirer l’attention sur des enjeux environnementaux (les sites nucléaires deviennent des cibles privilégiées par les créatures, l’homme se retrouvant considérablement vulnérable sur ces points stratégiques) sans prendre la tête du public. Néanmoins, Godzilla ne surprend jamais. C’est ce qui l’empêche de dépasser Pacific Rim. Malgré une mise en scène qui vise le réalisme (les ambiances sonores et les bruitages sont particulièrement soignés), une fois que la grosse surprise est dévoilée, il n’y a plus grand-chose d’inattendu. Les grosses scènes d’action esquissées dans le trailer y passent toutes, et passé l’excellente introduction (les quarante premières minutes), on commence à voir où les troupes se dirigent et on anticipe les temps forts du reste du film. Sa fluidité reste remarquable (les deux heures passent en un éclair) et sa caractérisation des bestioles témoigne du plaisir de l’équipe à les avoir mis en scène, mais il manque le grain de folie pour faire gonfler le tout. C’est un peu la limite paradoxale que le film a atteint : en voulant rester trop sérieux et à vouloir épater la galerie avec ses visions colossales, le film n’a pas réussi à nous faire aimer ses protagonistes lisses et à nous immerger totalement dans son récit. Néanmoins, le plaisir est là, et le film de Kaiju à l’ancienne, ça garde une certaine gueule. Peut être de quoi penser à faire une suite…
4/6
2014
de Gareth Edwards (II)
avec Aaron Taylor-Johnson, Bryan Cranston