Nouveau pavé dans la mare avec un film basé sur l’œuvre de Ketchum, un auteur d’horreur hard core toujours inédit en France. Il semblerait que notre bonhomme aime les situations malsaines et qu’il s’échine à défendre des points de vues qui dérangent, et qui reste en tout cas à mille lieues de la morale bienpensante traditionnelle. Si l’angle sous lequel Red attaque son sujet le place en deçà de ses frères et sœurs (un The girl next door traumatisant, un The Woman sulfureux…), son sujet n’en est pas moins couillu, puisqu’il s’affiche comme un brûlot engagé pour la mort de ceux qui maltraitent les animaux. Tuer un mec qui a tué un clébard. Un dilemme moral encore une fois ambigu sur lequel ce film s’aventure, en prenant toutefois largement ses distances.
L’histoire : Avery Ludlow est un septuagénaire dynamique, un paisible retraité qui vit dans un cadre bucolique et qui agrémente son quotidien de sorties pêche, accompagné par son fidèle Red, un chien affectueux d’une dizaine d’année. Cependant, Red est tué par un des adolescents du village, au cours d’un acte de violence gratuite.
L’engagement propre aux films inspirés des écrits de Ketchum se retrouve dans cette petite péloche, qu’on sera peu surpris de voir co-réalisée par Lucky Mckee, un fervent admirateur de l’écrivain. Toutefois, le style d’approche rappellerait plutôt Rob Reiner dans son approche posée de la communauté rurale que nous allons explorer. Le script est conscient qu’il traite avec un sujet politiquement incorrect : le droit de tuer quelqu’un suite à des violences sur des animaux. Il va donc slalomer sur la piste en explorant divers procédés. Tout va d’abord passer par l’acte de violence, tranchant radicalement avec le calme décrit dans la situation initiale, et l’acte en lui-même, gratuit et profondément révoltant. Mais Red ne reste encore qu’un chien. Il va par conséquent bénéficier d’une certaine humanisation, avec notamment l’anecdote d’un chasseur et de son fidèle compagnon, qui viendra renforcer l’attachement à l’animal. Mais ce sur quoi le film va jouer davantage, c’est sur l’apparente sous-estimation du délit en question. En effet, du côté de la Police, l’acte est à peine puni, d’une amende symbolique et de quelques jours de prison. Et quand Ludlow se confronte avec le père de la saloperie adolescente, ce dernier met toujours sa parole en doute, et ne proposera qu’une compensation financière aux demandes de notre retraité. Il n’est jamais vraiment question de justice, et c’est le déni constant du principal accusé et de sa famille qui agace de plus en plus dans le film. C’est en insistant principalement sur la mauvaise foi des coupables (qui ne cessent de répéter que ce n’était qu’un chien en niant toujours les faits) que le film va peu à peu nous les faire prendre en grippe, tout en développant le personnage de Ludlow, qui a connu une grosse tranche de souffrance avec la mort de sa femme et de son fils dans un incendie criminel). Son passé a donc été préalablement détruit par un acte gratuit, et c’est un nouvel acte de violence gratuite qui vient de détruire le nouveau « proche » qui vivait avec lui. Le film s’attaque ensuite à la vengeance progressive de Ludlow, qui compte beaucoup sur la stupidité de l’adolescent en question pour l’amener à commettre des erreurs et à attirer l’attention des autorités (le procès étant lancé, mais traînant en longueur). C’est à partir de là que le film commence à prendre des distances qui tranchent avec l’engagement du postulat de départ. En effet, Ludlow suit Danny (le gosse tueur de chien) pour lui faire peur et l’amener à provoquer, et c’est toujours ce dernier qui commet l’erreur qui aggrave la situation. Le film déresponsabilise régulièrement Ludlow en insistant sur la bêtise de Danny, qui tentera de frapper Ludlow en public, et qui ouvrira en premier le feu sur notre septuagénaire. Certes, c’est efficace, mais un peu facile, le flinguage final apparaissant alors comme un acte de légitime défense et plus comme une vengeance. D’ailleurs, le film insistera beaucoup sur les états d’âmes de Ludlow après les faits, sur ses regrets d’avoir tué 2 personnes (le troisième ayant été abattu par sa propre famille). Et pour faire encore passer la pilule, nous aurons aussi le frère du délinquant qui viendra s’excuser auprès de Ludlow, sans pour autant oser trahir sa famille. Un personnage finalement plutôt bien esquissé, même si son importance reste mineure au cours du film… Au final, Red (le nom du chien) n’est pas aussi choquant que les autres références du cinéma de Kechtum (même the lost pouvait se révéler plus efficace dans les faits, malgré sa longueur). Mais derrière un vernis plutôt classique et sans rythme (le film traîne parfois la patte pour en arriver aux faits), le politiquement incorrect est bien là : peut-on tuer au nom d’un animal ? La réponse est oui, mais uniquement si la personne impliquée n’est pas récupérable, ce qui semble apparemment le cas ici. Si l’ensemble manque de pêche, l’œuvre a sa place près des références précédemment citées, et malgré sa facture télévisuelle, le tout se révèle être un drame plutôt poignant et engagé. Sympathique, et parfait pour une initiation en douceur au style de Ketchum.
4/6
2009
de Trygve Allister Diesen, Lucky McKee
avec Tom Sizemore, Robert Englund
Tiens, un visage connu !