Soirée SF. Les cacahouètes sucrées sont prêtes, la bière est à 7°C, le fauteuil est confortable, le téléphone portable débranché… Oui, tout s’annonce vraiment bien pour ce soir. Au menu, deux films de SF de calibres très différents : District 9, super production avec seulement 37 millions de dollars, qui a épaté le box office mondial, et qui a réussi la prouesse de concilier geeks et cinéphiles sur le plan de la qualité (et pourtant, on commence sérieusement à sentir la division des deux groupes, avec Tron Legacy). Et de l’autre La montagne sacrée, un petit film qui a l’air de se la jouer sobre avec un The Rock tellement anachronique qu’il m’a vraiment décidé à le voir (et aussi sur les conseils d’un ami amateur de SF). Et à la fin de la soirée, j’étais fixé : il y en a un archi nul et un qui est archi bon. Mais dans quel ordre ?... La réponse… maintenant : District 9 est génial, la montagne ensorcelée est une purge.
District 9 : Quoi de plus décourageant ces temps ci qu’un projet tourné en caméra à l’épaule ? Merde, on s’est déjà tapé les paranormal activity, un dernier Exorcisme moyen… Si quelques projets comme Cloverfield, Rec ou encore Monsters restent fréquentables, c’est un format qui devient de plus en plus galvaudé dans le milieu cinéphile. Et là, c’est génial, ça fonctionne du tonnerre. Parce que les caméras varient. On a des caméras de surveillance, des reportages télé, des vidéos amateurs… Une multitude de supports sont utilisés pour donner un poids crédible aux images qui nous sont montrées. Et pour ceux qui arrivent à le tolérer, c’est complètement immersif. Et là-dessus, on embraye sur l’histoire, qui part très vite sur de la xénophobie extra terrestre, et nous refait carrément l’apartheid à sa sauce (avec un doux vent de politiquement incorrect en ce qui concerne la compagnie gérant le camp de réfugié alien et sur les bandes armées qui s’y trouvent. En gros, le sujet parfait pour parler d’un problème de société aux masses sous le signe du jubilatoire. Car il serait totalement absurde de nier le statut jubilatoire du film. Il sait exactement comment nous faire plaisir, dans quelle zone il faut nous stimuler et dans quel ordre. D’abord nous faire monter la pression en plaçant le héros dans une situation délicate, en l’amenant à réévaluer ses positions vis-à-vis du camp extra-terrestre, puis en le lançant à fond vers des objectifs simples et bourrins. On ajoute à ça un arsenal extra-terrestre meurtrier (le gore est 100% jubilatoire, au premier degré), une fin inattendue pour les sentiments qu’elle sous entend, et des personnages assez crédibles dans un histoire au final plus simple qu’elle n’en avait l’air (pas pour rien que certains journalistes l’aient qualifié de meilleure adaptation de jeu vidéo d’un jeu n’existant pas). L’acteur principal est d’ailleurs une vraie surprise tant il parvient à rentrer dans la peau de son personnage, particulièrement antipathique dans ses débuts, et que nous parviendrons peu à peu à apprécier. Le film fonctionne bien, et ne nécessite pas vraiment d’analyse, car il est d’une clarté remarquable. Pas vraiment de subversion (l’expropriation du début est clairement montrée sous un angle négatif, avec un joli climax dans la chambre à œufs), des enjeux précis et un final totalement jouissifs, ce sont des ingrédients qui font leurs preuves. Neil, c’est un très bon départ, on attend ton film suivant avec une impatience débordante.
5/6
de Neill Blomkamp
avec Sharlto Copley, David James (II)
La Montagne ensorcelée : Au secours, sortez-moi de là ! Comme je me suis surpris à le penser 5 minutes après le début du film, il n’y a pas tant de budget que ça. Mais bon dieu, se montrer aussi peu inspiré, ça s’est rarement vu. C’est bien simple : ce film est un concentré de clichés, de démagogie et de pompage des chefs d’œuvre du genre en plus soft. Si vous continuez à me lire, vous allez être servis. On commence avec The Rock, un chauffeur de taxi qui embarque 2 gamins lui donnant une somme de quelques dizaines de milliers de dollars pour les emmener dans un coin peaumé. Très vite, le FBI leur tourne autour. Et là, c’est parti. Les aliens sont en fait des humains qui utilisent leur cerveau à pleine puissance (donc nous, on est des cons limités cérébralement. J’aime). Ca donne lieu à quelques gentilles blagues d’un humour convenu que j’éviterai de ressortir. On a droit aux clichés new âge habituels : les extra terrestres aiment les animaux, les respectent, parlent avec eux… Bref ils sont le Bien incarné. Ils se rendent dans une cache secrète où des champignons géants pondent des I phones au design Toy’s r’ us avant qu’une espèce de Predator leur tombe dessus. C’est le méchant, la force brute du film. Après, ils s’échappent, se réfugient dans un bar, retournent à Las Vegas… Précisons que les aliens pratiquent la télékinésie. Parallèlement à cela, alors qu’absolument rien de l’y pousse, The Rock insiste constamment pour protéger les aliens et les suivre (c’est beau, les élans paternels), et embarque une scientifique dans l’affaire qui parle science et qui méprise les geeks (la seule chose qui la rende humainement tolérable, ces derniers étant des fanboys insupportables incapables de faire la différence entre un costume amateur et un authentique Predator se baladant dans la convention scientifique). Bref, carrément nanardeux malgré son casting hétérogène et ses effets numériques (et encore), la performance des acteurs est aussi convaincante que le camouflage du camping-car (trois brindilles posées sur le pare-brise). Tentant de nous faire passer une randonnée familiale pour une dangereuse course poursuite, le film se permet tous les excès, même les plus intolérables, comme ce final complètement pompé sur Alien 4, où le héros ose le clin d’œil de trop en arrachant le masque de l’extra terrestre tueur : « T’as pas une gueule de porte bonheur ! ». Nanardeux jusqu’à la moelle, ce film est une bonne grosse purge comme je n’en avais plus vu depuis longtemps. Un bel étron qui a gâché une heure trente de ma vie et qui, je l’espère, ne gâchera plus la vôtre maintenant.
0000000/6 (mais un honorable 13/20 en mode nanar)
de Andy Fickman
avec Carla Gugino, Dwayne Johnson
"Attention, ne passe pas sous cet arbre. C'est dangereux, tu pourrais te prendre un gland !"
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